Chez Luc (brèves de comptoir)

"Chez Luc", le bar où l'on peut venir bavarder ensemble à propos des choses qui fâchent, ou qui réjouissent, ou qui émeuvent ... Je vis près d'Avignon, en Provence. J'ai trois bons copains qui viennent au bar pour nous raconter la dernière du jour : Jack, de Belinto en Provence, Patrick, d'Audierne en Bretagne, et Philippe, de Piriac en Bretagne du sud (qu'on appelle aussi "Pays de Loire").

Les auteurs (le patron et les habitués)

Photo Luc

Luc, Avignon

Photo Padraig

Padraig, Audierne

Photo Jack

Jack, Belinto

Photo Philippe

Philippe, Piriac

jeudi 25 janvier 2007

Les valeurs de l'Abbé Pierre

abbe Pierre

L'abbé Pierre nous a quitté lundi matin. C'était un homme bon et généreux.

Le 1er février du terrible hiver 1954, il lança un appel mémorable sur les antennes de Radio-Luxembourg (future RTL) :
« Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée cette nuit à 3 heures, sur le trottoir du boulevard de Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant-hier, on l’avait expulsée. Devant leurs frères mourant de misère, une seule opinion doit exister entre les hommes : la volonté de rendre impossible que cela dure. Je vous en prie, aimons-nous assez tout de suite pour faire cela. Que tant de douleur nous ait rendu cette chose merveilleuse : l’âme commune de la France, merci ! Chacun de nous peut venir en aide aux sans-abri. Il nous faut pour ce soir, et au plus tard pour demain : 5 000 couvertures, 300 grandes tentes américaines, 200 poêles catalytiques. Grâce à vous, aucun homme, aucun gosse, ne couchera ce soir sur l’asphalte ou les quais de Paris. Merci. »

Le lendemain, la presse titra sur « l’insurrection de la bonté ». L’appel rapportera 500 millions de francs en dons (dont 2 millions par Charlie Chaplin), une somme énorme pour l’époque et complètement inattendue, des appels et courriers qui submergèrent complètement le standard téléphonique de la radio, et des dons en nature d’un volume si immense qu’il fallut des semaines pour simplement les trier, les répartir et trouver des dépôts pour les stocker convenablement un peu partout en France.

Et, à partir de là, il va continuer son combat jusqu'au bout, continuant la lutte pour ceux qui sont restés au bord du chemin de la vie.

L'Abbé Pierre a toujours inspiré le respect, parce qu'il incarnait ce que la nature humaine a de plus noble au fond d'elle-même. Tout le monde était très ému en sa présence, comme Coluche en mars 1986, quand il vient lui apporter un chèque parce qu'il "a eu du rab" avec son action des restaus du Coeur ...




L'Abbé Pierre qui nous quitte, c'est encore un grand homme qui va vous manquer beaucoup.

Mais, dans le cynisme actuel et le chacun-pour-soi général qui nous entoure, ne croyez pas que tout le monde soit comme ces bobos qui disent ne pas aimer les riches et qui se font une SCI pour éviter de payer des droits de succession. La France profonde, décriée par certains, est pleine de gens simples, honnêtes, anonymes, qui se reconnaissent dans l'authenticité de la démarche de l'Abbé Pierre.

Dans les années cinquante, la liberté, l'égalité et la fraternité étaient des mots qui avaient du sens. Eh bien je pense que ces valeurs et celles de l'Abbé Pierre sont encore partagées aujourd'hui par toute une France authentique dont on ne parle pas souvent.

Je sais bien que "les bons sentiments" ça fait pas très branché, et c'est même vu comme plutôt ringard par certains, mais je m'en fous. Ca fait chaud au coeur, et c'est bien comme ça.

Pour en savoir plus :
1. Abbé Pierre (Wikipédia)
2. Emmaüs France (site officiel)

Sur le même thème :
1. Cela se passait en 1956 ... (Chez Luc)
2. Jean-François Deniau (Chez Luc)

Crédit photo : dpa - Crédit vidéo : Prepaeco

5 Comments:

Blogger Jack said...

Pas ringard du tout Luc, non ce qui est ringard c'est de récupérer son nom et son image pour faire de la basse politique !
Beaucoup ont tenté de s'en emparer, et çà, je suis sur qu'il n’aurait pas aimé. L’abbé il a su très tôt utiliser les médias, je me souviens de l’époque où il, plongeait dans deux mètres d’eau du haut d’un mât pour amasser quelques sous en faveur des miséreux, de l’époque où il s’était fait élire député de Meurthe & Moselle.
Jamais pour servir la soupe à un parti quel qu’il soit, il n’appartenait à aucun système, même celui de l’église. (qui parle aujourd'hui de canonisation !)C’est aussi pour cette raison qu’il est sympathique aux français, souvent rétifs à la discipline et à la hiérarchie.

jeudi, 25 janvier, 2007  
Blogger Padraig said...

Il faut une grande intelligence pour comprendre que la misère est au-delà des lois.

Beaucoup de gens d'église l'ont compris et professé en leur temps (mais pas toujours avec la bénédiction d'une église un peu trop frileuse) - on peut aussi citer Mgr Jacques Gaillot - qui, à la suite de ses prises de position sur ces sujets, a été "promu" évêque de Partenia (diocèse disparu depuis 1 500 ans, situé dans l'actuelle Algérie, à proximité de Sétif). L'abbé Pierre lui-même était tenu à bonne distance de l'église bien-pensante...

Et il y a quelques grands intellectuels actifs, comme Albert Jacquard (Polytechnicien, Généticien, Professeur d'Université, Ecrivain, Officier de la Légion d'honneur et Commandeur de l’Ordre national du Mérite, Prix Scientifique de la Fondation de France, membre du Comité national d’Éthique, et ancien Président de l'Association DAL "Droit au Logement") - c'est lui qui m'avait ouvert les yeux sur ces sujets à l'occasion du squat organisé par DAL rue du Dragon en 1994.

Et, même si je ne goûtais pas forcément toujours son humour, des gens comme Coluche oeuvrent dans ce sens...

La relève est certainement assurée, mais malgré ces pressions, on peut douter que le politique sache régler la question...

vendredi, 26 janvier, 2007  
Blogger Luc said...

Un hommage national a été rendu hier à l'abbé Pierre à Notre-Dame de Paris. Tout le monde est venu se recueillir auprès du cercueil du "petit père des pauvres", les anonymes comme les puissants.

Tout le monde ... sauf Mademoiselle Royal, qui a préféré aller passer le week-end au soleil, aux Antilles, au prétexte d'aller revisister les lieux de son enfance. L'ordre juste, tout ça, c'est bien joli, mais dans la vie, il faut quand même savoir se fixer des priorités. Surtout quand on veut devenir Présidente de la République Française ...

samedi, 27 janvier, 2007  
Anonymous Anonyme said...

@Luc, je ne voudrais surtout pas que tu penses que je prends la défense de cette pimprenelle, mais la passion t’égare et le parti-pris évident qui éclate très souvent dans tes écrits finit pas être contre productif : retiens toi bon sang !
Je suis sur que l’abbé attendait les politiques ailleurs qu’autour de son cercueil, je t’invite à relire ce que tu as écrit sur lui.
C’est plus facile d’aller à son enterrement que de continuer son combat, les politiques ont certainement quelque choses à faire pour diminuer le nombre d’exclus et il ne me semble pas que leur nombre ait diminué ces temps-ci.
Moi, j’ai décidé de ressortir mon béret en son honneur : c’est pas çà qui va beaucoup aider les sans logis...

samedi, 27 janvier, 2007  
Blogger Luc said...

@ Jack : Je parlais des valeurs de l'abbé Pierre, et je me disais que pour une candidate socialiste, le symbole aurait été bienvenu de venir s'associer à la démarche de l'abbé Pierre par sa simple présence. Tout ce qu'elle avait à faire c'est de décaler sa virée en Martinique et à La Guadeloupe de 24 heures. Je pense qu'Aimé Césaire aurait compris et n'en n'aurait pas pris ombrage.

Mais non : elle n'a pas jugé utile de s'associer à l'hommage de la nation Française à l'abbé Pierre. Bon, libre à elle, après tout.

Mais bon, entre la France de l'abbé Pierre et la France de Diam's, j'ai une préférence pour celle de l'abbé.

Question de valeurs, sans doute ...

samedi, 27 janvier, 2007  

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