"La prédiction est un art difficile, surtout lorsqu'elle concerne l'avenir."Au mois de juin, le baril de pétrole
dépassait la barre des 140 dollars, après dix huit mois de hausse consécutive. J'avais alors déclaré, je cite :
"Donc, on continue dans la joie et la bonne humeur. J'avais annoncé 150 dollars le baril pour Noël, je pense à présent qu'on devrait facilement atteindre les 200 dollars."Depuis, le cours du baril est redescendu, puis est
repassé au dessus des 120 dollars en septembre. Après, il y a eu
le crac boursier que l'on sait. Et depuis, le prix du baril est en chute libre. Il est actuellement
aux alentours de 38 dollars.
Alors, évidemment, Patrick a suivi avec gourmandise cette chute au jour le jour, en ajoutant commentaire après commentaire
à ma note du 23 septembre ! Normal : j'avais annoncé qu'on dépasserait les 200 dollars à Noël, on est à 38 dollars, je me suis donc bien planté, et pas qu'un peu. Notez-bien qu'il y a des sujets sur lesquels j'aime assez avoir tort. Je préfère un baril à 38 dollars qu'un baril à 200 dollars. Et si avec ça l'économie mondiale, quasi entièrement basée sur le pétrole, ne repart pas, c'est qu'on y met vraiment de la mauvaise volonté !
Bon, alors, que s'est-il passé ?
Eh bien, comme à chaque fois, c'est une conjonction de facteurs multiples :
(1) L'offre et la demandeEn examinant les dernières
statistiques de l'EIA, on constate que, après avoir stagné à 84,6 millions de barils par jour pendant 3 ans, la production a légèrement grimpé en 2008 :
- 1er trimestre 2008 : 85,3 millions de barils par jour.
- 2ème trimestre 2008 : 85,6 millions de barils par jour.
- 3ème trimestre 2008 : 85,6 millions de barils par jour.
Effectivement, on peut comprendre que, à un prix supérieur à 100 dollars le baril, les producteurs soient tentés de vendre tout ce qu'ils peuvent !
Ce qui fait que, pour la première fois depuis 2006, l'offre a dépassé la demande au second trimestre 2008, qui a été de 85,2 millions de barils par jour.
Du coup, l'offre dépassant la demande, la hausse des prix a subit un coup d'arrêt.
(2) La spéculationAvec la hausse vertigineuse qu'on a connu jusqu'en juin 2008, les spéculateurs s'en sont donnés à coeur joie, et ont acheté du pétrole dans des proportions astronomiques. Ce qui n'a fait qu'accélérer la hausse des cours, bien sûr.
Puis, il y a eu le crash de Wall Street. Une des caractéristiques d'un crash bancaire, c'est que, pour faire face à ses échéances, on est obligés de vendre tout ce qu'on peut vendre, même si ce n'est pas au cours auquel on l'a acheté. Donc, depuis septembre, toutes les banques d'affaire, les une après les autres, vendent leur "pétrole". Le marché est donc inondé de "pétrole spéculatif", ce qui fait chuter les prix à un niveau artificiellement bas.
Voilà pour les causes.
Mais, en ce qui concerne le baril à 200 dollars, je persiste et signe. Même si ça n'a pas été pour ce Noël-ci (et c'est tant mieux), c'est pour bientôt. Une
étude de l'International Energy Agency prédit que la demande mondiale, qui est actuellement de 84 millions de barils par jours, va passer à 106 millions de barils par jour en 2030. Et comme on n'a aucune idée d'où on va les sortir, ces barils supplémentaires, le baril devrait dépasser les 200 dollars d'ici là.
En attendant, profitons du baril à 38 dollars pendant qu'il en est encore temps ...
Pour en savoir plus :
1.
Le pétrole termine en hausse à New York, la première en dix séances (AFP)
2.
Light Crude Oil (CL, NYMEX) (TFC Commodity Charts)
3.
Le baril de pétrole dépasse 140 dollars (Chez Luc - juin 2008)
4.
Le baril de pétrole dépasse à nouveau les 120 dollars (Chez Luc - septembre 2008)
5.
After the credit crunch, the oil crunch: watchdog warns over falling supplies (The Guardian)
6.
Oil Market Report (IEA)
Crédit graphique : TFC Commodity Charts